Zakouski ou la Vie Joyeuse

d’après des récits de Mikhaïl ZOCHTCHENKO

Mise en scène : Serge PONCELET

Traduction : Éric PRIGENT

Avec : Stéphane ALBERICI, Marie DUVERGER, Mathieu RINSANT, Olga SOKOLOW


Assistante à la mise en scène : Nadyne LANDUCCI

Costumes : Barbara GASSIER

Masques : Stéphane ALBERICI
Lumières : François MARTINEAU
Univers sonore : Ulrich MATHON
Régie : Kevin MARTIN
Graphisme : André PALAIS
Photos : Eve GROZINGER

Production : Marthe Girard

Diffusion : Delphine Ceccato
Presse : Catherine Guizard, La Strada et Cie

Durée : 1h20

UNE PRODUCTION DU THÉÂTRE YUNQUÉ

En coréalisation avec Arthea asbl (Bruxelles) et le Théâtre de l’Opprimé (Paris 12e). Avec l’aide du mécénat privé. Avec le soutien de la Ville de Montreuil, du Théâtre Berthelot et de l’Espace Alya à Avignon. Le spectacle bénéficie du label AKDT50 en Belgique.

Résidence et création le 27 janvier 2012 à l'Espace Théâtral Scarabaeus, Bruxelles. Représentations :
* le 28 janvier 2012 à l'Espace Scarabaeus.
* du 8 février au 4 mars 2012 au Théâtre de l'Opprimé, Paris 12e.
* du 13 au 15 décembre 2012 au Théâtre Berthelot à Montreuil (2 le samedi).
* du 7 au 30 juillet 2016 à l’Espace Alya – Festival Avignon off.
* le 17 décembre 2016 à l’Auditorium Vol de Nuit de Neuilly-sur-Marne (2 séances)
soit 51 représentations.

"Quatre acteurs incarnent devant nous ce condensé d’humanité (au total dix-huit personnages) dans une farandole burlesque pour un rire gagné sur le tragique de la vie, un rire salvateur et universel."

SUR SCÈNE

Au théâtre, un soir de représentation dans une grande ville : un serveur, un acteur, Marousska une spectatrice passionnée, un inspecteur toujours à l’affût et justement… une succession d’imprévus… des malentendus… une galerie de portraits qui débordent du cadre... Tel est le début d’un désordre festif qui va s’infiltrer dans divers lieux : les appartements, le tramway, l’église, le cinéma, les bains publics, le tribunal... D’autres figures sociales comme l’ouvrier, le citoyen porté sur la boisson, le milicien, la cerbère, vont les rejoindre et se confronter à nos personnages récurrents. Quiproquos, plaisirs immédiats, rencontres amoureuses mais aussi trahisons et prémices d’une répression latente vont se succéder suivant les lieux investis. En parallèle à ces situations fictives, un nouvel arrivant, l’auteur, vient nous faire partager les étapes décisives de son itinéraire sentimental, tout en traversant l’Histoire. Zochtchenko, en digne héritier de Gogol, brocarde ses semblables dans un miroir déformant où gravitent différents spécimens d’une société fissurée.

Quatre acteurs incarnent devant nous ce condensé d’humanité (au total dix-huit personnages) dans une farandole burlesque pour un rire gagné sur le tragique de la vie, un rire salvateur et universel.

NOTE SUR LA MISE EN SCÈNE PAR SERGE PONCELET

Durant ces vingt dernières années, j’ai eu l’occasion très souvent de côtoyer l’univers du théâtre burlesque, surtout lors des stages que j’ai donnés mais aussi dans certaines mises en scène. Eric Prigent m’a parlé récemment de Mikhaïl Zochtchenko, auteur russe totalement oublié ou à peine connu en France alors qu’il était considéré comme le maître de la littérature satirique des années vingt en URSS. La lecture d’un de ses principaux recueils Contes de la vie de tous les jours comprenant trente-deux contes très courts, puis la découverte de son œuvre (romans, nouvelles, récits) m’ont enthousiasmé. Eric a donc préparé une adaptation pour quatre comédiens, tirée de plusieurs ouvrages. Il ne s’agit pas d’une pièce mais d’un ensemble de scènes burlesques d’après les récits de Zochtchenko : des personnages récurrents se retrouvent dans une sorte de maelstrom où des liens ténus vont entrelacer leur destin. L’Histoire de petites gens en marche…

L’écriture de Zochtchenko est laconique, le rythme sec et nerveux. Les situations qu’il décrit, alternant fiction et souvenirs d’enfance, portent toujours la trace d’une subversion latente pouvant mener au dérèglement de toutes les valeurs. L’adaptation d’Eric Prigent, soucieuse de respecter cette thématique tout en la théâtralisant, se tient au plus près de ce style. Il s’en dégage une force corrosive, naviguant entre grotesque et merveilleux.

L’équipe artistique se nourrit de Chaplin, Keaton, Murnau, Pabst, des avant-gardes russes du début du XXe siècle, et des peintres Ensor, Grosz, Otto Dix entre autres. Le travail avec les comédiens est concentré sur l’axe texte-corps. Pas de psychologisme : un traitement des obsessions des personnages, de leurs débordements avec la jubilation que cela suppose. Nous insistons sur le découpage des lignes géométriques et des déséquilibres des corps.

La scénographie comprend quatre pôles : la table aux zakouskis, le plateau nu, un petit castelet (enfance), et des lieux suggérés par l’éclairage. Les costumes et accessoires, une musique inspirée des années 20-30, les effets sonores décalés, les lumières en clair obscur et en lignes brisées, les ombres aux accents expressionnistes contribuent à faire surgir l’univers burlesque et inventif de Zochtchenko. La fluidité et l’enchaînement des vingt-trois scènes distillent un rythme fiévreux et chorégraphique.

La prégnance de l’œuvre de Zochtchenko dans notre société, la cruauté joyeuse et parfois involontaire engendrée par le comportement des personnages, voilà ce à quoi nous nous attelons avec cette nouvelle création. Destiné au tout public à partir de dix ans.

D’après MIKHAÏL ZOCHTCHENKO (1895-1958), auteur de nouvelles, romans.

"Comment se fait-il que l’humoriste russe le plus célèbre de l’ère soviétique soit inconnu du public francophone, alors qu’il ne le cède en rien à ses confrères européens ou anglo-saxons ? En effet, de son vivant, Mikhaïl Zochtchenko était admiré à tel point qu’il devait souvent se déguiser sous un pseudonyme pour résister aux assauts de ses admirateurs... « C’est du Zochtchenko ! » voilà une exclamation familière à tous les Russes depuis les années vingt." - Michel Davidenkoff

Méconnu en France, Mikhaïl Zochtchenko est un satiriste des plus populaires en Russie. Héritier de Gogol, il a donné des portraits savoureux de la vie soviétique ; le tsar de l’époque n’était pas Nicolas Ier mais Staline...

Zochtchenko naît en 1895 dans une famille de petite noblesse ; son père est artiste peintre. Il commence des études de droit, mais les interrompt en 1914 pour servir comme officier d’infanterie. Passant deux ans en première ligne, il est décoré cinq fois, blessé, gazé – son cœur en subira de graves séquelles – et réformé en 1917 avec le grade de capitaine. De retour à Petrograd juste après la Révolution de février, il exerce des petits métiers pour subsister : comptable, cordonnier, agent de police, aviculteur… Période d’extrême instabilité, pendant laquelle il acquiert une expérience incomparable des hommes et de la société soviétiques.

En 1921, il commence à publier des contes qui ont un accueil très favorable. Ses nouvelles Les Bains, L’Aristocrate font de lui un écrivain célèbre. Il fréquente les milieux littéraires de Petrograd, Blok, Essenine et plus spécialement le groupe des « Frères Sérapion » patronné par Gorki. C’est durant cette période de la NEP (Nouvelle Politique Economique), un peu l’équivalent de nos Années Folles, que s’épanouit le style Zochtchenko : on parle comme ses personnages, il reçoit des milliers de lettres.

Pour autant Zochtchenko n’est pas, et ne sera jamais un homme heureux. Il souffre de neurasthénie depuis l’adolescence et ses succès n’empêchent pas son état d’empirer. En vain les médecins lui prescrivent un traitement par l’eau, des séjours à Yalta et Sotchi . Sous Staline, la satire sociale est proscrite, l’humour doit être positif. En 1946 Zochtchenko est l’objet, en même temps qu’Akhmatova, d’une virulente attaque par Jdanov. Insulté, accusé de perversité et de décadentisme, il est exclu de l’Union des Ecrivains, interdit de publication et privé de tout moyen de subsistance. Se refusant à toute autocritique, il poursuit son travail mais meurt en 1958, dans sa ville de Leningrad.