Macbeth

tragédie de William Shakespeare

Mise en scène : Serge PONCELET

Traduction : Éric PRIGENT

Distribution : Johann Mateo ALBALADEJO, Eirin Marlene FORSBERG (Lady Macbeth), Luc MANSANTI, Serge PONCELET (Macbeth), Eric PRIGENT, Philippe SIMON, Olga SOKOLOW

Assistant à la mise en scène : Lionel BRIAND

Costumes : Barbara GASSIER et Marie ODIN

Création lumières : François MARTINEAU

Univers sonore : Ulrich MATHON

Graphisme : André PALAIS

Photos : Eve GROZINGER

Relations presse et diffusion : LA STRADA ET CIE

Administratrice de production : Marthe GIRARD

Durée 1h50

UNE PRODUCTION DU THÉÂTRE YUNQUÉ

en coréalisation avec le Théâtre de l’Opprimé (Paris 12e), avec le soutien du Théâtre de Bligny (Essonne), du Théâtre de la Boutonnière (Paris 11e) et de l’Adami

Création le 21 mars 2009 au Théâtre de Bligny à l’issue d’une résidence du 9 au 21 mars.

Représentations

* du 1er avril au 3 mai 2009 au Théâtre de l’Opprimé

* le 27 novembre 2009 à la salle Gerard Philipe à Lisses (Essonne)

Soit 27 représentations.

"26 scènes, 22 personnages pour 7 acteurs. Environ 1h50 de spectacle. Le puzzle doit se construire sur une mécanique rythmique très élaborée qui est la signature de nos précédents spectacles. La fluidité des scènes et l’efficacité des enchaînements peuvent s’apparenter à une véritable chorégraphie, transposition scénique d’un monde enfiévré qui court, s’affole, se perd. La marche en avant du destin et de la tragédie est à ce prix."

NOTE SUR LA MISE EN SCENE PAR SERGE PONCELET

A l’aube de trois décennies de travail théâtral, le temps me semble venu d’aborder à nouveau le continent Shakespeare, que j’avais côtoyé lors de mes études théâtrales à l’Insas puis de manière plus approfondie lors de la série des Shakespeare du Théâtre du Soleil. Jamais à la mise en scène, pourtant bon nombre de mes collègues m’y incitaient.

J’aborde par le versant le plus noir: Macbeth, la tragédie du cauchemar. Le surgissement du fantastique et du surnaturel avec ses augures et ses oiseaux de malheur, ainsi que les thématiques du pouvoir conquis à tout prix et de la chute inéluctable m’ont poussé à ce choix. Car ce cauchemar m’interpelle par ses ambiances nocturnes (“La nuit succède à la nuit”), son couple maléfique, ses personnages légendaires comme Duncan, Banquo, Macduff et d’autres, sans oublier comme toujours chez Shakespeare les truculents personnages issus du peuple.

La nature perturbée par l’irruption du surnaturel : dès la première scène, l’apparition des soeurs fatales nous plonge dans un conte horrifique où la nature influence les âmes et exacerbe les passions. Le surnaturel symbolise l’ordre humain bouleversé : la nuit domine mais le sommeil disparait (le cauchemar doit rester éveillé), les morts ressuscitent, La terre se désole sous le règne de Macbeth et c’est une “armée végétale” (la forêt de Birnam) qui rétablira l’ordre.

Macbeth est l’ambitieux crédule et craintif qui « devient un forcené sans inhibition » (Freud) ; Lady Macbeth son « instigatrice à la trempe d’acier » est prête à sacrifier sa féminité pour dominer et règner, mais Macbeth est entraîné bien au-delà de ce qu’elle avait voulu, dans une série de crimes toujours plus crapuleux : après le régicide et presque parricide (le meurtre de Duncan), ce sera le crime fratricide (Banquo), et enfin le plus crapuleux : celui de l’enfance (le fils Macduff). Lady Macbeth s’écroule, « malade écrasée de remords ».

Les soeurs fatales sont un peu la pierre de touche des mises en scène de Macbeth. Nous n’avons pas voulu les traiter en « sorcières », nous nous interdisons même ce terme puisque Shakespeare les appelle « soeurs fatales ». Pour nous elles sont comme des elfes ou des faunes, peut-être bienveillantes, rejoignant en cela les sorcières du moyen âge qui souvent étaient bien plus des sages femmes, des ermites étudiant la nature et acquérant une certaine connaissance que des êtres maléfiques. Elles sont les « accompagnatrices du public » pour entrer dans le conte-cauchemar, avec une jubilation de l’instant et un plaisir évident à dévoiler leurs prédictions.

L’équipe de sept acteurs s’est formée autour d’un noyau déjà formé lors d’un précédent spectacle, Crime et Châtiment. J’interpréterai le rôle de Macbeth dans la lignée d’autres grandes figures du Mal interprétées auparavant, Caligula, Pol Pot au Théâtre du Soleil, dernièrement Créon.

Forts de l’univers du masque, du théâtre corporel pratiqué depuis des années, le travail des comédiens s’est nourri des influences du Nô et du Kabuki, des arts martiaux mais aussi du cinéma muet et de l’expressionisme allemand. C’est dire que nous évitons le jeu psychologique pour privilégier le rapport obsessionnel des personnages, leur but poursuivi, l’urgence à y parvenir.

La scénographie est légère, à base de matériaux oscillant entre la toile, le tulle et l’univers végétal (bambous, feuilles mortes…). Très peu d’accessoires, juste l’essentiel comme l’objet obsessionnel (ex : le couteau). Par contre j’attribue un grand rôle à l’univers sonore, ainsi qu’aux éclairages accentuant les atmosphères, le contraste clair-obscur, les ombres inquiétantes, les couleurs sombres et le surgissement du rouge lors des meurtres.

Les costumes sont lointainement inspirés des guerriers de l’armée en terre cuite de l’empereur Qin (le cimetière des 6000 guerriers qui m’a très fortement impressionné lors d’un de mes voyages en Asie) et l’univers de pantins-marionnettes désarticulés chers à Kantor. Les tissus auront les traces de l’usure d’un passé lointain mais indéfini. Les maquillages fardés concorderont avec les statures aux lignes brisées.

26 scènes, 22 personnages pour 7 acteurs. Environ 1h50 de spectacle. Le puzzle doit se construire sur une mécanique rythmique très élaborée qui est la signature de nos précédents spectacles. La fluidité des scènes et l’efficacité des enchaînements peuvent s’apparenter à une véritable chorégraphie, transposition scénique d’un monde enfiévré qui court, s’affole, se perd. La marche en avant du destin et de la tragédie est à ce prix.

Nous vivons dans un monde de violence où la guerre est omniprésente. Nous emparer de cette tragédie pour « montrer l’histoire comme un mécanisme fascinant » (Jan Kott), travailler la langue riche de ce grand dramaturge, fouiller avec les comédiens et l’équipe artistique son univers fantastique et profondément humain, voilà le projet qui nous a habités durant de longs mois et que nous proposons de partager avec le public pour un théâtre universel et jubilatoire.

NOTE SUR L’ADAPTATION / TRADUCTION PAR ERIC PRIGENT

Macbeth est la plus courte des tragédies de Shakespeare, mais la plupart des traductions dilatent le texte au-delà de trois heures… Le propos de Serge étant de rendre à la pièce son urgence et sa concentration, et de la jouer à sept acteurs en moins de deux heures, nous avons tout repris à zéro.

Le problème des traducteurs en français, indépendamment du langage poétique, réside dans l’emploi dominant par Shakespeare de monosyllabes qui sont comme des molécules de sens. Le vers libre à cinq temps (le fameux pentamètre ïambique : ti-tom ti-tom ti-tom ti-tom ti-tom) donne l’illusion du langage parlé tout en introduisant un rythme très prégnant ; avec souvent des exceptions (ti-tom-tom) qui sont toujours comme des indications de jeu pour l’acteur car elles font ressortir les images à mettre en valeur.

J’ai donc tenté de rendre cette concentration et ce rythme en français. A vous d’en juger…